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Nous ignorons qui nous sommes, mais nous savons que nous vibrons au contact du monde ; souvent les normes grammaticales, orthographiques, de mise en page et d’édition contraignent la parole, la littérature, la fiction, la pensée dans des espaces trop petits, trop restreints, trop taillés dans la norme : ça suffoque en dedans de nous-mêmes.
Nous sommes fatiguées de lire, voir, entendre toujours les mêmes paroles, toujours les mêmes voix et les mêmes langues, toujours les mêmes mots portés sur des plateaux d’argent et projetés dans les salles.
Alors pourquoi toujours dire oui alors qu’on pourrait simplement
Regarder ailleurs.

Les tuyaux de nos corps parlent et revendiquent le sale et l’anecdotique, l’horizontalité et le vulgaire.
Nous brisons les tours d’ivoires, cherchons les camarades pour faire du crayon une arme collective.

LE KRACHOIR

c’est l’usurpation aux anciens bacs à bave

Il faut de la salive pour aimer, parler, tourner des pages, lécher, avaler, baiser, s’interroger, se sauver, risquer et mourir.

On ne devrait pas mourir tout sec, non plus se noyer d’ailleurs, c’est une affaire d’équilibre, de nuances ou de vases communicants. De bouches trouées. En ce lieu, nous crachons, nous crachons nos violences, nos peurs, et les surgissements de nos joies en paragraphes, nous crachons la beauté, le désir, la colère libérés des endroits convenables et convenus, nous laissons les trous béants, nous laissons sortir une mélasse commune, nos écritures et leurs dires sont des territoires potentiels de recommencements

écrire, c’est sortir de soi$ un jaillissement – un cri – un coup – écrire c’est se vider pour laisser la place, recevoir des choses, pour que les mots et les idées se mélangent, nous échappent et fabriquent des récits inattendus, de monstrueuses éclosions que nous appelons, parfois, poésie.

C’est aussi s’offrir, accueillir les glaires, les laver aux torrents de nos larmes, les digérer, les régurgiter ou échouer, ne rien faire, ne laisser subsister qu’une tentative nous venons faire acte nous revendiquons le sale et le dérisoire, l’horizontalité et les désirs anti-capitalistes nos pensées ne sont pas dogmatiques, elles errent, se réinventent, et pensent contre elles- mêmes, sans cesse, elles s’affranchissent, nous tentons de créer nos représentations, nos images et nos futurs, et nous vous donnerons le monde à voir si fort que vous voudrez vous en arracher les yeux.

Par ces temps sauvages, avidement, nous cherchons la fulgurance absolue d’un texte qui prend vie, une littérature qui déborde, vertigineuse, pense l’impossible et toujours l’explore, crée des segments, la possibilité d’être vulnérable, de jouir d’une langue commune, et se libère…